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L’attrait des investissements dans les entreprises familiales cotées

Avril 2022
Communication marketing

Ce qui fait avancer les entreprises familiales: l’actionnariat actif

Les entreprises familiales ont trouvé de nouveaux moyens pour entretenir la motivation et la vision de leurs fondateurs. Ce type d’actionnariat actif s’avère essentiel à l’attrait qu’elles exercent pour les investisseurs.

C’est un problème sur lequel les économistes se cassent les dents depuis des décennies. Toutefois, la relation principal/agent – la tendance des actionnaires et dirigeants d’une entreprise à tirer dans des directions différentes – devrait aussi préoccuper les investisseurs en actions. Lorsque de tels conflits surviennent, ils sont généralement de mauvais augure pour les performances de l’entreprise et, par conséquent, pour le rendement des investissements.

Les sociétés cotées en bourse contrôlées par des familles permettent aux investisseurs d’éviter le piège de la relation principal/agent.

Par leur nature même, ces entreprises font non seulement coïncider les intérêts des actionnaires et des dirigeants, mais elles ont également appris à adapter leur modèle d’exploitation à leur rythme de croissance et de complexification.

En d’autres termes, les entreprises familiales d’aujourd’hui ont découvert de nouvelles façons de maintenir «l’actionnariat actif» de leurs fondateurs. C’est un des piliers de leur réussite commerciale.

Des recherches montrent que, grâce à la stabilité de leur leadership, les entreprises contrôlées par des familles affichent de meilleures performances que leurs homologues qui ne le sont pas. Elles gèrent leurs finances de façon plus prudente, investissent davantage dans l’innovation et la R&D et ne se tournent que rarement vers des fusions et acquisitions coûteuses1. Elles ont également tendance à prendre les questions environnementales, sociales et de gouvernance (ESG) plus au sérieux, et affichent de meilleurs scores sur les critères ESG que les entreprises cotées non familiales (voir Figure).

Gestion responsable
Score des controverses ESG: entreprises familiales et non familiales
Controverses ESG
Source: Sustainalytics, Pictet Asset Management; données au 21.02.2022. L’univers des entreprises familiales de Pictet Asset Management est défini comme celui des sociétés cotées en bourse dans lesquelles une personne ou une famille détient au moins 30% des droits de vote. Les sociétés doivent afficher une liquidité minimale quotidienne de 5 millions USD. Toutes les régions et tous les secteurs sont inclus, mais les entreprises des marchés émergents sont limitées à celles dont la capitalisation boursière minimale est de 10 milliards de dollars US. L’actionnariat doit être composé de fondateurs/entrepreneurs ou de membres de la génération suivante. Sont exclues les entreprises impliquées dans des activités liées à des armes controversées ou causant des dommages environnementaux et sociaux significatifs.
 

Les entreprises familiales savent gérer la relation principal/agent de plusieurs façons.

Au cours des premières phases de leur développement, c’est leur structure même qui favorise l’alignement clair entre actionnaires et dirigeants.

Pour les entreprises de première génération dirigées par leur fondateur, celui-ci est également le plus souvent le propriétaire et le PDG. Dans de tels cas, la force de l’entreprise provient de la volonté d’entreprendre irrépressible de ses actionnaires-dirigeants. Meta (anciennement Facebook), par exemple, n’aurait pas connu son succès actuel sans Mark Zuckerberg à sa tête. De même, la société chinoise de jeux vidéos Netease doit une grande partie de sa croissance à l’ambition et à la vision de son fondateur William Lei Ding.

Pourtant, lorsqu’une entreprise se développe et son organisation se complexifie, le fait d'avoir un fondateur-PDG peut devenir un obstacle. La gestion de la croissance et de la complexité exige souvent de nouvelles compétences et une expertise qui font généralement défaut aux fondateurs. Des recherches récentes menées par des chercheurs de l’Université de Harvard décrivent ce problème2.

Ils ont recueilli des données auprès de 2 000 entreprises cotées, dont la moitié ont leur fondateur pour directeur général, afin de déterminer l’existence d’une relation entre la présence du fondateur à la tête de l’entreprise et ses performances financières.

Ils ont constaté que les valorisations des sociétés dirigées par leur fondateur lors de leur introduction en bourse étaient supérieures de 10% à celles des sociétés dont le fondateur ne siégeait pas au conseil d’administration. Cependant, ces avantages diminuaient avec le temps. La même étude a révélé que les fondateurs pouvaient apporter une contribution plus intéressante à leur entreprise en changeant de rôle et en transférant les responsabilités en matière de stratégie opérationnelle et commerciale à des dirigeants professionnels tout en conservant une certaine influence sur la culture.

Certains signes montrent que les entreprises familiales s’améliorent pour limiter le risque lié à un maintien en poste de leurs fondateurs au-delà d’une présence utile.

En 2019, Kevin Plank, fondateur de la marque de sport Under Armour, a quitté ses fonctions de directeur général et a confié les rênes à David Bergman, alors directeur des opérations. Plank n’a cependant pas quitté l’entreprise. Au lieu de cela, il a pris les fonctions de président et de responsable de la marque, une démarche qui lui a permis de mettre à profit son savoir-faire tout en restant de plain pied dans la culture de l’entreprise.

Transformer les descendants en leaders

Une autre solution déployée avec un certain succès par les entreprises familiales repose sur une meilleure formation de leurs futurs dirigeants. De nombreux fondateurs envoient désormais leurs héritiers dans les meilleures écoles de commerce et orientent leur parcours professionnel afin de leur faire passer des périodes utiles dans des fonctions de direction intermédiaire au sein de l’entreprise.

Parmi les sociétés qui ont adopté cette approche, figurent Hermès, dont le PDG Alex Dumas appartient à la sixième génération de la famille Dumas à diriger l’entreprise, et Arcelor Mittal, où Aditya Mittal a remplacé avec succès son père Lakshmi en tant que PDG, incarnant ainsi la troisième génération à la tête du groupe.

Pour les entreprises familiales où une telle possibilité n’existe pas, l’accent est placé sur la promotion interne comme moyen d’assurer la continuité et la cohérence des dirigeants.

Le géant pharmaceutique Roche, par exemple, entretient depuis longtemps une culture de promotion en interne. Si Andre Hoffmann-La Roche, qui représente la famille propriétaire, est vice-président de la société, son directeur général est Severin Schwan, qui a commencé comme stagiaire au sein de Roche en 1993 et a dirigé la division du groupe en Asie et son activité de diagnostic pendant plusieurs années avant de prendre ses fonctions.

Une autre solution déployée avec un certain succès par les entreprises familiales repose sur une meilleure formation de leurs futurs dirigeants.

Il y a toutefois quelques inconvénients au fait de maintenir de grands actionnaires dans la structure de gestion. On dit souvent que ce type de structure relègue les actionnaires minoritaires au second plan, en particulier sur les questions de gouvernance d’entreprise comme la rémunération des dirigeants.

Cependant, une étude récente a montré que les rémunérations des dirigeants d’entreprises familiales sont en moyenne comparables à celles appliquées dans les entreprises non familiales3. Par ailleurs, on compte de nombreux exemples de dirigeants familiaux ou de fondateurs qui ne perçoivent pas de salaire. Mark Zuckerberg (Meta) et Evan Spiegel (Snap) reçoivent seulement 1 dollar par an, et comptent sur leurs actions pour générer leur richesse. Dans des cas comme ceux-là, les intérêts des actionnaires majoritaires et minoritaires coïncident.

Les entreprises familiales ont donc découvert de nouvelles façons de préserver la dynamique entrepreneuriale propre aux hommes et aux femmes visionnaires qui les ont fondées. Nous avons pu observer que les principales caractéristiques de «l’actionnariat actif» – planification à long terme, équipes de direction qui «jouent leur peau», investissements élevés dans l’innovation – se retrouvent dans un groupe toujours plus étendu d’entreprises familiales cotées: les jeunes entreprises, les entreprises matures, celles qui ont un membre fondateur de la famille à leur tête et celles dont les propriétaires familiaux conservent une influence en dehors du conseil d’administration. C’est ce qui, selon nous, en fait des investissements en actions potentiellement supérieurs.


Références

[1] Voir, par exemple: https://www.dcu.ie/sites/default/files/2021-01/surviving-a-crisis-as-a-family-business-report.pdf et De La Cruz, A., A. Medina et Y. Tang (2019), «Owners of the World's Listed Companies», OECD Capital Market Series, Paris, www.OECD.org/corporate/Owners-of-the-Worlds-Listed-Companies.htm.
[2] Voir https://hbr.org/2021/12/research-how-long-should-a-founder-remain-ceo
[3] Chief Executive Research, rapport 2018 sur la rémunération des directeurs généraux